RÉFRACTAIRES AU PAIEMENT DE LA PRESTATION COMPENSATOIRE : RÉGLEZ-LA ET ÉPARGNEZ !

Aussi paradoxal que cela puisse sembler, s’acquitter de la prestation compensatoire sans délai c’est épargner ! Cette réalité permet peut-être de consoler le conjoint condamné à cette indemnité, qui vise à réduire la disparité dans les conditions de vie que la rupture a générée.


En effet, de très nombreux dispositifs légaux conduisent à sanctionner tout retard de paiement de cette indemnité. Ces sanctions peuvent être d’autant plus préjudiciables qu’elles peuvent être de nature pénale et civile, c’est-à-dire cumulatives .. et simultanées.


Le législateur a de toute évidence entendu dissuader tout réfractaire au paiement par un arsenal législatif imparable :


Le débiteur de la prestation compensatoire n’a pas de choix, il doit  payer la prestation compensatoire, sans délai, dans le respect des termes de la décision qui l’a fixée :


Si l’article 1343-5 du Code civil prévoit la possibilité pour le Juge d’accorder à un débiteur la possibilité de reporter ou d’échelonner le paiement de sa dette sur une durée maximale de 24 mois, avec au demeurant un taux d’intérêt légal plus faible, et donc d’éviter toute mesure d’exécution forcée, cet article exclut expressément les « dettes d’aliments ».. telle que la prestation compensatoire.


Cette interdiction légale a été confirmée à de multiples reprises  par la jurisprudence de la Cour de Cassation (ex 1ère Chambre civile 29 juin 2011 N° de pourvoi : 10-16096, également en ce sens 2ème Chambre civile 29 août 2019 n° de pourvoi 18-14379), en des termes clairs et univoques :  nonobstant son caractère mixte, à la fois alimentaire et indemnitaire, la prestation compensatoire ne peut faire l’objet de délais de grâce.


Un droit aux intérêts


Que la prestation compensatoire soit réglée directement en un seul versement ou en plusieurs, ou, indirectement dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial des époux, les intérêts légaux sont dus, légalement, en application des dispositions de l’article. 1231-7 du Code Civil.


Ne vous réjouissez donc pas si la décision ne mentionne pas ces intérêts… ils demeurent dus, en toutes circonstances, et sont décomptés à partir du jour où le jugement a acquis la force de chose jugée, c’est-à-dire lorsqu’il est devenu définitif, après expiration des délais d’appel et cassation !


Lorsque la décision fixant la prestation compensatoire a prévu que le débiteur serait autorisé à la régler en plusieurs règlements, les intérêts courent à compter du jour où chaque terme est devenu exigible et sont alors calculés sur le montant de l’échéance impayée.


Le point de vigilance est manifeste : ces intérêts peuvent être conséquents si la prestation compensatoire est réglée via la liquidation de la communauté, plusieurs années après le prononcé du divorce.


Cette solution s’explique par le caractère indemnitaire de la prestation compensatoire : le créancier bénéficiaire de ladite prestation aura en effet subi un préjudice du fait de l’immobilisation de son capital. Le taux d’intérêt légal vient sanctionner cette immobilisation.


Le conseil avisé est le suivant : débiteurs de la prestation compensatoire, envisagez des alternatives si la liquidation de votre régime matrimonial était trop complexe et longue, pour vous acquitter de ladite prestation !


Ce conseil est d’autant plus utile que le taux de l’intérêt légal peut être majoré s’agissant de la prestation compensatoire, en application des dispositions de l’article 313-3 du Code Monétaire et Financier ; lequel a pour objectif de renforcer l’exécution des décisions judiciaires.


Des procédures d’exécution forcées onéreuses


Le retard de paiement entraine évidemment la faculté pour le créancier d’user des voies d’exécution forcées mises à sa disposition par la Loi, avec l’assistance d’un huissier, qui imputera ses frais fixes mais pourra par ailleurs imputer au débiteur fautif une rémunération proportionnelle aux sommes recouvrées.


Inutile d’être fort en mathématiques pour envisager le poids financier de telles mesures, comme l’épargne réalisée par le règlement en temps de la prestation compensatoire !


La perte du seul avantage de la prestation compensatoire : la réduction fiscale


L’article 199 octodecies du Code Général des Impôts permet au débiteur de la prestation compensatoire de réaliser une réduction fiscale de 25 % des sommes fixées ou convenues, dans la limite de 30 500 € (soit une réduction maximum de 7 625 €).


Pour en bénéficier, il faut cependant que la prestation compensatoire soit réglée dans les 12 mois qui suivent la date à laquelle le divorce est devenu définitif. A son instar, le créancier est également non imposable sur la somme perçue.


Veillez au compteur !


Le droit est garant de tous les intérêts, ceux des créanciers comme ceux des débiteurs..